Et si on luttait contre les vrais fraudeurs ?
A l’heure où le G20, l’OCDE et la commission européenne accentuent leurs efforts pour lutter contre l’évitement fiscal et consolider des recettes qui profitent à tous, en Côte-d’Or , nous semblons vivre sur une autre planète : c’est aux pauvres que la droite s’attaque une fois de plus en lançant la traque aux “fraudeurs” aux allocations (RSA, PCH,…).C’est une décision doublement injuste et inefficace.
Injuste parce que la majorité des “fraudes” détectées relève de situations fragilisées par le grand-âge, l’isolement ou la maladie. Une simple erreur peut vite conduire à un amalgame avec une “fraude”. Un meilleur contrôle des déclarations et un plus grand accompagnement en amont pour remplir ces déclarations devraient largement suffire à l’éviter. Encore faut-il vouloir simplifier les déclarations ou donner les moyens aux travailleurs sociaux d’accompagner les demandeurs !
Injuste encore parce que, simultanément, rien n’est fait pour lutter contre le non-recours aux droits sociaux. Ce phénomène consiste à ne pas bénéficier d’une prestation à laquelle on a pourtant droit. Et selon le Ministère du Travail, pour le seul RSA-activité, le non-recours a été de 68% en 2011. C’est-à-dire déjà plus que le nombre de bénéficiaires.
Inefficace enfin car la majorité départementale reste silencieuse sur les champions toutes catégories des fraudes sociales et fiscales : les employeurs. Le dernier rapport de la Cour des Comptes sur la Sécurité sociale estimait le manque à gagner à près de 20 milliards d’euros par an en cotisations sociales. Quant à la fraude fiscale, elle a été estimée entre 60 et 80 milliards d’€ dont les deux tiers sont le fait des entreprises multinationales qui se domicilient dans les paradis fiscaux, bien avant d’être celui de riches particuliers… Des sommes à rapprocher du total indument perçu par les fraudeurs aux allocations, qui n’en représentent que 2 à 3 % maximum !“La fraude des pauvres, c’est une pauvre fraude” relève ainsi la presse spécialisée. Et lutter contre la fraude des pauvres, c’est lutter contre une pauvre fraude. Ce ne peut être ni une solution ni une ambition crédible pour la cohésion sociale. Et si on luttait contre les vrais fraudeurs ?
Tribune publiée dans le numéro de décembre 2014 de Côte-d’Or Magazine.