Céline MAGLICA : Qui a peur de la parité ?

Les droites départementales et le président du Conseil Général en tête font croire depuis plusieurs semaines qu’ils sont les seuls défenseurs d’une ruralité menacée car abandonnée de tous ! A grands coups de publications populistes, armés de costumes en velours côtelé, chaussés de bottillons crottés, ils avancent la main sur le cœur, l’œil mouillé, la mine sombre et proclament « Nous ne vous abandonnerons pas ! » Mais derrière ces mauvaises pantomimes se cache une réalité moins chevaleresque !

Car la réforme des collectivités territoriales qui sera instaurée dès 2015 impose ce qui fait peur aux droites départementales : la parité ! Et ils auront beau nous faire croire qu’ils sont plus en avance que le groupe de gauche au Conseil Général parce qu’ils ont « le double de femmes »….c’est-à-dire 4 sur 22 conseillers généraux !

La gauche , si elle n’était pas encore exemplaire en la matière, est en train de le devenir : le premier gouvernement paritaire installé par François Hollande, parité instaurée dans les élections ( il suffit de regarder les affiches des dernières élections législatives pour constater qu’à droite les duos restent homme/homme) et enfin binôme paritaire pour les futures élections cantonales en 2015. Alors oui, il reste du chemin à parcourir et c’est ce chemin que se propose d’accomplir la nouvelle réforme territoriale.

Instaurer un binôme paritaire c’est faire en sorte que, sur tout le territoire, des hommes et des femmes représentent la population. C’est reconnaître que les femmes ont les mêmes compétences , qu’elles sauront parfaitement siéger dans ces assemblées , qu’elles sauront prendre des décisions, des initiatives avec la fermeté mais aussi le souci de justice et d’équité nécessaires à toute mise en œuvre politique. Pour cela, il faut une loi. Car il n’y a qu’un homme pour croire qu’il suffit à une femme d’avoir des compétences pour émerger dans les partis politiques ! Il n’y a qu’un homme pour croire que les choses se font naturellement quand on sait qu’il n’y a que 13% de femmes dans les conseils généraux !

Quand on sait que les femmes continuent d’être rémunérées 23% de moins que les hommes à compétences égales ! Quand on sait que 82 % du temps partiel est subi par les femmes ! Nous faire croire que cette réforme est mauvaise parce qu’elle délaisse les territoires ruraux est grotesque : il suffit de reprendre la réforme que voulait instaurer le précédent gouvernement soutenu par toutes les droites départementales. La réforme version Nicolas Sarkozy prévoyait de mêler conseiller général et conseiller régional ce qui amenait à détruire le statut du conseiller général qui est un élu de proximité.

Devenant aussi conseiller régional, cet élu aurait dû étendre le champ de son action à toute la Région ! Si l’on veut que le conseiller général reste un élu de terrain qui prend le temps d’écouter et d’agir, il ne faut pas multiplier ses missions mais lui permettre de mieux les exercer . Or le binôme un homme/une femme qui sera mis en place permet ce travail de présence, d’écoute. Oui il faudra apprendre à travailler en partenariat plutôt que de manière individualiste : mais n’est-ce pas justement cet égocentrisme de l’homme politique que les citoyens rejettent élection après élection ? Un binôme c’est une équipe, deux regards et de la concertation. Oui c’est un réel changement et les conservateurs ont par nature et par définition toujours peur du changement. Mais n’oublions pas que les cantons n’ont pas été repensés depuis 200 ans !

Vivons-nous aujourd’hui de la même manière ? Les concentrations de populations ont évolué, les populations sont mobiles. Il n’y a aucune guerre ouverte entre les citoyens vivant dans les territoires ruraux et ceux vivant en ville ! Il ne s’agit pas d’opposition mais de choix de vie ou de « choix » lié à l’activité ou aux prix des logements. Il n’y a que le monde politique pour faire semblant de croire que la guerre serait déclarée entre les uns et les autres ! Le conseiller général devenant conseiller départemental représentera un territoire qui forme un ensemble soudé : le territoire de son département.

Quand il vote au Conseil Général, il ne vote pas que ce qui concerne « son » canton .Le futur conseiller départemental et la future conseillère départementale seront aptes à voter des budgets justes en faveur des territoires qui ont besoin d’être accompagnés et dynamisés. Ils seront ces élus qui prennent les orientations qui leur semblent justes pour l’ensemble de leur département et pas seulement ces notables qui distribuent leurs subventions dans un sourire complice, ces Bouvard et Pécuchet satisfaits d’eux-mêmes. Ce que les citoyens attendent de leurs élus c’est bien qu’ils soient des hommes et des femmes qui prennent leurs responsabilités avec courage, honnêteté et transparence. Et je fais confiance aux femmes pour user de ce courage et de cette détermination. Il suffit d’écouter notre ministre Christiane Taubira pour constater que la puissance intellectuelle, l’éloquence, la maîtrise de soi, la culture et la fermeté ne sont pas l’apanage des hommes.

A ceux qui ont peur de ne pas trouver de femmes pour ces futures élections, je dis « Commencez par en chercher une et vous en trouverez ! » C’est bien cette altérité qui nous est proposée aujourd’hui, cette complémentarité entre les compétences d’un homme et celles d’une femme. Bien plus qu’un médiocre combat de coqs déchiquetant un morceau de territoire pour asseoir son autorité, c’est une nouvelle vision de la politique qui va émerger avec cette réforme. Politique qui se fera désormais avec des hommes mais aussi des femmes …n’en déplaise à certains !

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